L’enquête menée par le site Meilleursagents.com en septembre (2015) sur la part des revenus mensuels consacrée à l’achat le démontre bien. Dans quatorze villes sur trente analysées, cette part dépassait les 33 %, soit a priori le seuil au-delà duquel les banques ne prêtent plus. C’est évidemment le cas à Paris, où elle flambe à 79 %.
Immobilier : acheter ou louer ?
« Je viens de mettre mon appartement en vente avec la ferme intention de redevenir locataire » ; « J’ai vendu mon appartement, je loue et je fais plein d’économies » ; « A tous les dinosaures qui pensent qu’il est toujours mieux d’acheter car on se constitue un patrimoine, ouvrez les yeux, on a changé d’époque ! »
Des messages comme ceux d’Ilya, de Martin ou de Deputy, nous en avons lu beaucoup lorsque nous avons demandé à nos internautes s’ils préféraient acheter ou louer.
Pourquoi l’achat ne fait plus autant rêver ? D’abord, pour nombre de locataires, la question ne se pose pas : « Je n’ai pas les moyens de devenir propriétaire », tranche Marie-Hélène. En effet, malgré la baisse des prix et des taux, sur laquelle les agences immobilières et les banques ne cessent de communiquer, l’accès à la propriété n’est toujours pas à la portée de tous les ménages.
L’achat pèse bien plus sur les revenus que la location
L’enquête menée par le site Meilleursagents.com en septembre 2015 sur la part des revenus mensuels consacrée à l’achat le démontre bien. Dans quatorze villes sur trente analysées, cette part dépassait les 33 %, soit a priori le seuil au-delà duquel les banques ne prêtent plus. C’est évidemment le cas à Paris, où elle flambe à 79 %. Mais c’est vrai aussi de Nice, Bordeaux, Aix-en-Provence, Montpellier, Lyon, Toulouse, Lille, Toulon, Nantes, Villeurbanne, Marseille, Rennes et Strasbourg.
De leur côté, les locataires ne franchiraient cette limite que dans sept villes sur trente. Et encore, l’étude ne tient compte que du prix d’acquisition. Si on y ajoutait les frais de notaire, les charges de copropriété, la taxe foncière… le déséquilibre serait plus important.
Vous n’habitez pas dans l’une de ces communes où l’achat est devenu quasiment impossible ? Ou votre situation financière vous permet malgré tout de devenir propriétaire ? Félicitations ! Mais l’opération sera-t-elle rentable ?
Une chose est sûre : les coûts inhérents, frais de notaires et éventuellement ceux d’agence, pèseront forcément sur vos finances pour un moment.
Mais combien de temps faudra-t-il conserver votre bien pour que ces frais soient absorbés ? Cela dépendra évidemment de sa qualité et de sa situation. D’après une simulation publiée en septembre par le courtier en crédits Meilleurtaux.com et effectuée sur 37 villes françaises, l’acquisition d’un 70 mètres carrés serait rentabilisée entre un et seize ans.
Mais cette durée peut s’allonger pour une petite surface et ce, jusqu’à quatre fois plus. Comptez 17 ans en moyenne pour un 30 mètres carrés, contre quatre ans en moyenne pour un 70 mètres carrés.
De quoi casser le mythe selon lequel l’essentiel étant de mettre un pied dans le marché immobilier le plus rapidement possible, il vaut mieux commencer par un petit logement que l’on revendra pour acquérir plus grand. « Je n’ai acheté que quand j’étais en mesure de m’offrir un bien où je devais, en théorie en tout cas, pouvoir rester pas mal de temps », énonce d’ailleurs Adeline.
Faire une plus-value, ce n’est plus systématique
En réalité, les frais liés à l’achat, comparés à ceux de la location, ont toujours été beaucoup plus lourds. Alors pourquoi, aujourd’hui plus qu’autrefois, la balance aurait-elle tendance à pencher en faveur de la seconde ? N’oublions pas qu’une variable influence largement les résultats de l’équation : il s’agit de l’évolution future des prix.
Or, elle est devenue très incertaine. « Avant, on achetait avec l’espoir de faire une belle plus-value », explique Thomas Lefebvre, responsable recherche et développement chez Meilleuragents.com. « Désormais, on ne peut plus compter là-dessus. ».
Non seulement les prix, malgré une légère baisse, ont atteint des niveaux inaccessibles pour une large majorité des Français mais les facteurs qui soutiennent leur pouvoir d’achat, des taux bas et encore quelques aides de l’Etat, sont fragiles.
Pour ce qui est des taux, il est impossible de présager à quelle échéance ils remonteront, mais il est évident qu’une telle situation ne pourra pas s’éterniser. Quant aux aides, il y a certes un élargissement du prêt à taux zéro dans l’ancien, mais entre la majoration de la taxe foncière sur les terrains constructibles, la taxation des logements vacants, l’encadrement des loyers… on voit bien que l’objectif de l’Etat est d’accroître les recettes et de réduire les dépenses.
Autre temps, autres mœurs, difficile de s’engager pour la vie
Quel que soit le nombre d’années, il n’effrayait pas ceux qui achetaient une maison pour y fonder une famille et y vivre heureux avec beaucoup d’enfants. Or, cette image d’Epinal n’a plus vraiment lieu d’être.
D’une part, les prix ne permettent plus forcément d’acheter d’emblée le bien de toute une vie. D’autre part, lorsque c’est le cas, entre séparations, recompositions des familles et nécessité d’être plus mobile professionnellement, qui peut être certain de vivre vingt ans au même endroit ?
Au contraire, on est de plus en plus souvent contraint de vendre précipitamment. Ceux qui ont été confrontés à ce problème en plein blocage du marché sont sans doute vaccinés pour longtemps contre l’achat.
A l’image de ce couple ayant trois enfants, qui a dû déménager lorsque le petit dernier est arrivé. Il lui a fallu plus d’un an pour trouver un acquéreur et durant toute cette période, la famille a dû assumer une mensualité de crédit en plus d’un loyer. « C’est une expérience que je ne souhaite plus jamais connaître », assène Quentin, le père.
Quant à la solution qui consisterait à mettre en location en attendant le meilleur moment pour revendre, elle n’est plus d’actualité non plus. « Entre la fiscalité toujours plus lourde, la baisse des loyers et les difficultés à se séparer d’un locataire indélicat, c’est loin d’être une solution idéale », estime Denys Brunel, président de la Chambre nationale des propriétaires.
Enfin, n’oublions pas que dans les années à venir, la plupart des propriétaires devront assumer la rénovation énergétique de leur logement. Bien sûr, le coût de ces opérations variera fortement selon l’ancienneté du bâtiment, les travaux déjà effectués et le type de bien, en copropriété ou maison individuelle.
L’avenir, encore plus sombre avec les travaux obligatoires
Prenons l’exemple courant d’une copropriété de plus de 50 lots avec de nombreux travaux à prévoir, disposant d’un système de chauffage collectif. Il faudra d’abord réaliser un audit spécifique avant la fin de l’année 2016.
A l’issue de celui-ci, tous les bâtiments privés résidentiels dont la consommation en énergie primaire (non transformée) dépasse 330 kilowattheures par mètre carré et par an, soit tous ceux qui affichent une classe énergétique F ou G, devront avoir été rénovés d’ici 2025.
Philippe, président du conseil syndical d’une copropriété tombant sous le coup de ces deux obligations, a fait le calcul : « Selon le scénario choisi, la taille de l’appartement et le remplacement ou non des fenêtres, on aboutit à des coûts de 8 000 à 25 000 euros par appartement. »
D’ici à 2050, tout le parc existant devra avoir atteint le niveau du label BBC actuel. Pour y parvenir, c’est certain, les propriétaires mettront encore la main à la poche.